Petit reporter en Australie, épisode 3
Le vieil homme en blanc, les jeunes en couleurs et le petit mouton noir.
Ce n'est pas un scoop :je travaille pour l'Eglise. RCF est un médium chretien. Ma radio un "organe diocesain". Et c'est bien l'éveché qui apporte pres de 50% du budget de RCF Saone et Loire. Mes auditeurs ? Une tres grosse majorité de chrétiens. Tous ne frequentent pas l'église chaque dimanche, mais la plupart sont proches de la religion.
Et puis il y a les JMJ. Journées Mondiales de la Jeunesse. L'evenement le plus important de l'Eglise Catholique apres une election papale. Imaginez un peu : 250 000 jeunes du monde entier, réunis autour d'un thème definitivement spirituel " Venez Recevoir l'Esprit Saint ". Ces jeunes là ne buvaient pas, fumaient rarement, priaient beaucoup et tres peu de bruits suspects dans les tentes la nuit.
Si on résume j'etais donc journaliste d'une radio chretienne, envoyé dans la capitale mondiale du catholiscisme pour quelques jours et encerclé de jeunes tres croyants.
Pourtant je ne crois pas en Dieu. Même pas à quelque " Grand Horloger". Cela ne m'a jamais posé de problème dans mon travail. Traiter les sujets religieux fait bien sûr parti de mon travail. Je le fais sans trainer les pieds. Il s'agit pour moi d'un sujet comme un autre. C'est la même chose que de travailler sur un thème politique, culturel ou mêmeun fait divers. Bien sûr, comme on me le fait souvent remarquer, j'ai de " grosses lacunes en ce qui concerne les sujets religieux". Malgré mon education Judéochretienne dans les établissements privés de la bonne société nancéenne, il est vrai que certains détails de la réligion Chretienne m'échappent encore. Mais, il me semble que mon métier n'est pas de savoir. Le journaliste pose des questions. Il ne doit pas tout connaitre. Il lui faut par contre les bases necessaires pour interroger son interlocteur et poser les questions justes. Alors je potasse un peu. J'ai dans mon bureau l'encyclopédie " Théo" et je fais regulierement l'aller-retour vers le bureau de ma chef pour lui demander quelques precisions.
Malgré mon manque de Foi, j'ai une grande tendresse pour les croyants. J'ai dans mes amis les plus chers des personnes tres proches de la Religion. Je suis pote avec des curés et j'aime bien promener mon micro dans les allées de la Communaute de Taizé.
N'empeche que j'ai été un peu surpris lorsque l'on ma choisit pour partir aux JMJ. " Euh Moi ? Vous êtes surs ? Vraiment ?" . J'avais l'impression d'être le petit mouton noir de l'équipe. Pour que personne sur le terrain ne remarque mon ignorance, j'ai revisé. J'emportais avec moi en Australie, un carnet où j'avais traduit quelques mots du vocabulaire religieux : Foi, Pape, Esprit Saint. J'ai aussi cherché de l'info sur Internet pour voir à quoi ressemblaient les dernières JMJ en Allemagne.
Malgré mes précautions, ma hiérarchie semble avoir distingué mon leger décalage : Ma feuille de route ( la liste des reportages que je devais réaliser) était assez peu religieuse , beaucoup de sujets "annexes", plus dans mes cordes. Un dimanche matin, Edouard le pretre de l'équipe a celebré une messe dans une de nos chambres d'hotel. On a eu le bon gout de ne pas me reveiller.
J'ai pourtant aimé couvrir ces JMJ. Je l'ai même fait avec un tres grand plaisir et une vive curiosité. Voir autant de jeunes de mon âge, parler de leur Foi avec le sourire et une vraie fierté m'a intrigué. A Sydney, je voulais vraiment comprendre : comment, pourquoi; ces jeunes trouvaient un tel bonheur dans une notion qui ne me touchait pas. Je posais donc mes questions plus que pour mon simple micro. Non, leurs réponses étaient aussi pour moi. " Qu'est ce que ça veut dire avoir la Foi ? " c'est quoi l'Esprit Saint ?" " Qu'est ce que ça t'apporte au quotidien ?".
Je suis revenu d'Australie avec beaucoup de questions rebondissant dans ma tête. Des questions qu'on ne peut pas poser sur RCF. Des interrogations que je soumettrais aux plus pieux de mes amis.
Alors Non, je ne suis pas rentré croyant. Et oui, je me suis parfois senti comme un intrus dans cette foule. J'ai toujours aujourd'hui du mal à comprendre cette admiration autour du personnage de Benoit XVI. Mais je me suis aussi amusé. J'ai aussi rencontré des gens tres droles, interessants. J'ai écouté l'eveque de St Etienne avec passion, j'ai vu de beaux sourires. Et j'ai compris que tous ceux là etaient heureux.
Moi je ne le suis pas, mais le dimanche je fais la grasse matinée.